(Paris, le 5 mai 2016) – La parution d’une tribune dans l’hebdomadaire Marianne (à paraître ce vendredi) signée par 17 parlementaires rappelle l’obligation de la France d’apporter un soutien consulaire à tous les Français détenus à l’étranger, a déclaré aujourd’hui l’Association Atangana contre l’oppression et l’arbitraire (AACOA). Les parlementaires, apportant leur soutien à Michel Thierry Atangana, demandent l’ouverture d’une information parlementaire notamment pour comprendre pourquoi « certains de nos ressortissants ne bénéficient pas du même support diplomatique et judiciaire que d’autres ».
Michel Thierry Atangana, citoyen français, a passé 17 années de sa vie, confiné dans une cave du Secrétariat d’État à la défense du Cameroun, en isolement total, sans accès aux soins et sans communication avec le monde extérieur et en particulier avec sa famille. Sa santé physique et mentale a été mise gravement en danger.
Malgré les innombrables demandes envoyées aux autorités françaises pour qu’il bénéficie de la protection consulaire, Michel Thierry Atangana n’a connu sa première visite consulaire qu’en 2012, soit au bout de sa quinzième année de détention. Il cherche depuis à être rétabli dans ses droits avec notamment l’ouverture d’une enquête pour identifier les personnes responsables de sa privation de liberté et le versement d’une indemnisation pour les préjudices subis. Le 28 juin 2011, Michel Thierry Atangana a porté plainte avec constitution de partie civile devant les juridictions françaises pour séquestration arbitraire.
« Cette tribune de 17 parlementaires rappelle à l’État français que ses ressortissants de l’extérieur doivent toujours être placés au cœur de ses relations diplomatiques avec les Etats étrangers », a déclaré Michel Thierry Atangana. « La lutte pour ma réhabilitation ne sera utile que si l’ensemble des détenus français à l’étranger sont véritablement pris en charge par les autorités françaises ».
Dans leur tribune, intitulée « la France ne doit pas abandonner ses enfants », les parlementaires estiment « que 20% des 2558 Français actuellement détenus à l’étranger, dont au moins 518 sont détenus sans cause connue, ne bénéficient d’aucun soutien de la part de leur consulat ».
Michel Thierry Atangana a été arrêté au Cameroun le 12 mai 1997 sans mandat d’arrêt par des Forces spéciales de la police judiciaire de Yaoundé. Après 52 jours de garde à vue dans des conditions inhumaines, il a été condamné à l’issue d’un simulacre de procès en octobre 1997, sans la présence de ses avocats, à 15 ans d’emprisonnement pour détournement, tentative de détournement de deniers publics et trafic d’influence. En octobre 2012, il est condamné à nouveau pour les mêmes faits à 20 ans d’emprisonnement.
“Michel Atangana a été trop longtemps oublié. Il doit être maintenant réhabilité ! “, rappelle, le député de la Charente-Maritime, Olivier Falorni, l’un des signataires de l’appel.
Les parlementaires rappellent que « ce qui est arrivé à Michel Thierry Atangana aurait pu arriver à chacun d’entre nous ».
C’est finalement sous la pression du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, du Département d’Etat américain et d’ONG internationales que Michel Thierry Atangana est libéré le 24 février 2014. Il sera reçu à l’Elysée quelques semaines plus tard, le 28 mars 2014, par le Président de la République, François Hollande qui avait été mobilisé par une importante campagne de soutie
Le 13 novembre 2013, le Groupe de travail sur la détention arbitraire de l’ONU avait rendu un avis demandant au Cameroun de libérer immédiatement Michel Thierry Atangana, d’enquêter et sanctionner les responsables de sa détention arbitraire et de l’indemniser pour les nombreux préjudices causés par sa privation de liberté.
A ce jour, rien n’a été fait par le Cameroun ou la France pour réhabiliter Michel Thierry Atangana.
La tribune est reproduite dans son intégralité ci-dessous :
LA FRANCE NE DOIT PAS ABANDONNER SES ENFANTS
Cela fait aujourd’hui deux ans que notre concitoyen Michel Thierry Atangana a été libéré. Et deux ans que, malgré sa rencontre avec le Président de la République, François Hollande, et l’intervention de l’ONU, il n’a toujours pas été réhabilité. Cet homme ordinaire, pris dans une histoire extraordinaire, et que la France n’a pas su aider, ne peut toujours pas mener une vie normale.
Ce qui est arrivé à Michel Thierry Atangana aurait pu arriver à chacun d’entre nous.
En 1994, comme des milliers de Français, il choisit de s’expatrier. Il part s’établir avec sa famille au Cameroun, en tant qu’expert financier, pour aider à la construction du réseau routier du pays. Très vite, il se retrouve à la tête d’un fond important, qui gère les investissements de grandes sociétés multinationales. Tout lui sourit.
Et puis en 1997, en sortant de la messe avec sa famille, il est arrêté, sans aucune explication. Il apprendra plus tard qu’il est accusé, à tort, de soutenir un adversaire du Président en place, Paul Biya, dans la course à l’élection présidentielle du Cameroun. Tous ses biens sont saisis. L’argent des entreprises, lui, disparaît. On ne le retrouvera jamais.
Et c’est le début de 17 longues années de souffrance. De tortures physiques et psychologiques infligées dans une pièce de 7m2, sans fenêtre, située dans les sous-sols du Secrétariat d’État à la Défense. Michel Thierry Atangana n’est pas prisonnier. Il est otage. Un prisonnier a des droits. Il n’en a aucun. Un prisonnier sait pourquoi il a été arrêté. Il l’ignore. Un prisonnier a des contacts avec l’extérieur, il voit la lumière du jour. Michel Thierry Atangana n’a aucun contact avec l’extérieur. Dans sa cellule, il peut à peine étendre le bras.
Sans l’intervention du Département d’Etat américain, d’Amnesty International et de l’ONU, qui a mené 4 ans d’enquête avant d’exiger sa libération, Michel Thierry Atangana n’aurait probablement pas recouvré la liberté, le 24 Février 2014. Atteint, et malade, il serait probablement mort en prison.
Qu’a fait la France pour le faire libérer ? Rien. Ou presque. Il a fallu attendre15 ans, 15 longues années, avant qu’elle se rappelle de l’existence de son ressortissant. Et qu’elle exige d’avoir un droit de visite.
Pourquoi la France a-t-elle abandonné un de ses enfants pendant aussi longtemps ? Pourquoi refuse-t-elle, aujourd’hui, d’appliquer la décision du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire de l’ONU, qui demande la réhabilitation et l’indemnisation complète de Michel Thierry Atangana ? Qui demande que des sanctions soient prises contre ses responsables ? C’est la question que nous nous posons.
Comme Michel Thierry Atangana, un nombre croissant de Français détenus à l’étranger, comme récemment Serge Lazarevic, Marc Féret, ou Thierry Dol – tous anciens otages français –, se disent abandonnés par la France à leur retour. Marc Féret et Thierry Dol ont même porté plainte, convaincus que leur pays n’avait pas fait le nécessaire pour les libérer.
Comme Michel Thierry Atangana, on estime que 20% des 2558 Français actuellement détenus à l’étranger, dont au moins 518 sont détenus sans cause connue, ne bénéficient d’aucun soutien de la part de leur consulat.
Le cas de Michel Thierry Atangana, exceptionnel par sa longévité, est symbolique. En tant que députés, en tant que citoyen, nous souhaitons comprendre pourquoi certains de nos ressortissants ne bénéficient pas du même support diplomatique et judiciaire que d’autres.
Nous nous alarmons de cette rupture de l’égalité républicaine. Nous appelons donc d’une voix unie, forte et pleine de gravité, à l’ouverture d’une mission d’information parlementaire sur le traitement des Français détenus à l’étranger ou pris en otage, afin de clarifier les pratiques de notre protection diplomatique. Et de faire en sorte que chaque Français puisse pleinement bénéficier du soutien de la France.
Comme le disait Romain Gary : « La patriotisme c’est l’amour des siens. Le Nationalisme, c’est la haine des autres ».
Aujourd’hui, plus que jamais, nous nous devons d’être patriotes.
Pouria Amirshahi, Député NA de la 9ème Circonscription des Français établis hors de France – Henri Cabanel, Sénateur PS de l’Hérault – Gérard Charasse, Député PRG de l’Allier – Stéphane Claireaux,Député RRDP de la 1ère circonscription de Saint-Pierre-et-Miquelon – Sergio Coronado, Député EELV de la 2e circonscription des Français établis hors de France – Jeanine Dubié, Députée PRG des Hautes-Pyrénées –
Jérôme Durain, Sénateur PS de la Saône-et-Loire – Olivier Falorni, Député RRDP de la Charente-Maritime – Joël Giraud, Député PRG des Hautes-Alpes – Meyer Habib, Député UDI de la 8e circonscription des Français établis hors de France – Gilda Hobert, Député PRG du Rhône – Jérôme Lambert, Député PRG de Charente – Marie-Noëlle Lienemann, Sénatrice PS de Paris – Jean-Pierre Maggi, Député PS des Bouches-du-Rhône – Christophe Premat, Député PS de la 3 ème Circonscription des Français Établis hors de France – Stéphane Saint-André, Député PRG du Pas-de-Calais – Alain Tourret, Député RRDV du Calvados –
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